
Un rapport accablant de l’Office antistupéfiants (Ofast) met en lumière l’ampleur inédite des trafics de drogue en France. Le ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, qualifie cette situation de « menace existentielle » pour le pays. Le rapport de 62 pages, consulté par Le Figaro, révèle un territoire entièrement gangréné par les points de deal, ne laissant aucune « zone blanche ». En 2023, le commerce des stupéfiants est devenu le « plus grand marché criminel du pays », générant près de 7 milliards d’euros de chiffre d’affaires. Bruno Retailleau parle d’un « tsunami blanc » face aux saisies record de cocaïne, qui ont bondi de 130% en 2024, atteignant 53 tonnes.
Cette expansion des trafics s’accompagne d’une violence « désinhibée » de la part des narcos. L’Ofast constate que « nos villes sont désormais le théâtre de guerres de territoires qui se règlent à coups de kalachnikovs ou de grenades ». Cocaïne, cannabis, drogues de synthèse… Ces trafics sont la cause de la majorité des violences crapuleuses en France. En 2024, 367 assassinats et tentatives liés au narcotrafic ont été recensés, causant la mort de 110 personnes et blessant 341 autres. Depuis 2021, le nombre d’assassinats et de tentatives d’assassinats a augmenté de 33%, touchant 173 villes l’an dernier, contre 161 en 2023. Marseille (40 faits), Grenoble (14 faits) et Toulouse (12 faits) sont les plus affectées. Des villes moyennes comme Villeurbanne, Échirolles et Dijon connaissent des hausses significatives, et même des petites villes comme Florange sont touchées, témoignant du caractère diffus des crimes.
L’organisation criminelle marseillaise, la DZ Mafia, est qualifiée de « menace majeure » par l’Ofast en raison de son « ultraviolence » et de sa volonté d’expansion territoriale. Les narcos ont recours à diverses méthodes violentes, notamment les enlèvements-séquestrations, les « jambisations » (attaques ciblant les membres inférieurs) et les « rafalages » d’immeubles pour asseoir leur contrôle. Ces violences sont souvent déléguées à une main-d’œuvre recrutée pour des sommes allant de 2000 à 10.000 €. De plus, la détention n’est plus un frein pour les trafiquants, qui continuent de gérer leurs réseaux depuis leur cellule grâce à des téléphones portables illégaux. L’incarcération est même « mise à profit pour développer de nouveaux réseaux criminels ».
Bruno Retailleau souligne également le rôle des consommateurs : « S’il y a des dealers, c’est bien parce qu’il y a des consommateurs ». En 2023, 3% des Français, soit 1,1 million d’usagers, avaient consommé de la cocaïne au moins une fois dans l’année, contre 600.000 en 2017. Bien que moins répandue que le cannabis, la consommation de cocaïne a connu un essor important, en particulier dans la décennie 2010. Le cannabis reste la drogue la plus consommée en France, avec 5 millions d’usagers dans l’année, dont 1,4 million d’usagers réguliers et 900.000 usagers quotidiens.