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Le sociologue Samuel Zarka révèle l'invisibilité des techniciens du cinéma, acteurs clés de chaque film. Leur travail collectif est souvent occulté par les acteurs et réalisateurs, malgré leur rôle essentiel et la précarité de leur emploi.

Le sociologue Samuel Zarka, enseignant-chercheur à l’université Sorbonne-Paris Nord, met en lumière le rôle crucial et souvent méconnu des techniciens du cinéma dans son ouvrage « Ces invisibles qui font le cinéma » (Presses universitaires de France). Selon lui, ces professionnels doivent constamment prouver leur compétence à chaque nouveau projet de tournage, malgré leur contribution indispensable.

Pour fabriquer un film, une véritable armée est mobilisée, incluant les équipes du son, de l’image, les électriciens (« électros ») et les machinistes (« machinos »). Un tournage est un effort collectif impliquant entre 40 et 200 personnes. Bien que leurs noms apparaissent au générique, ces techniciens sont globalement « invisibilisés ». Le Festival de Cannes en est un exemple frappant : la montée des marches ne présente que le réalisateur et les acteurs principaux, occultant ainsi le travail collectif derrière le projet. Ce phénomène, où le produit final (comme un iPhone) éclipse ceux qui l’ont fabriqué, se retrouve dans d’autres industries.

Outre cette invisibilité, les techniciens du cinéma sont confrontés à une discontinuité de l’emploi, source d’une grande incertitude. Cette précarité n’est pas nouvelle, elle était déjà présente dans les années 1920. Elle avait été temporairement contenue grâce à l’instauration d’une carte d’identité professionnelle, limitant le nombre d’actifs pour assurer une régularité de travail. Cependant, ce dispositif a été supprimé en 2009, face à l’essor des productions audiovisuelles, ce qui a accentué la discontinuité des temps de travail. Les techniciens doivent donc naviguer entre les projets, chaque fois comme une nouvelle équation à résoudre.