
L’étude European Working Conditions Survey d’Eurofound révèle des avancées notables en matière de soutien professionnel en Europe, et particulièrement en France. Depuis 1990, cette enquête quinquennale analyse les facteurs contribuant à la qualité du travail. Le bien-être et la productivité des salariés sont fortement influencés par l’environnement social. En 2024, 73 % des travailleurs européens déclarent recevoir un soutien fréquent de leurs collègues. Le soutien managérial est également majoritaire, avec 64 % des hommes et 65 % des femmes bénéficiant de l’appui de leurs supérieurs hiérarchiques.
La France a significativement comblé son retard depuis 2005, affichant désormais des chiffres proches de la moyenne européenne. 74 % des répondants français se sentent soutenus par leurs collègues, et 68 % par leurs manageurs. Cependant, Laurent Cappelletti, enseignant-chercheur au CNAM, souligne qu’un tiers des manageurs ne remplissent pas pleinement leur rôle, générant un coût caché considérable pour les entreprises.
L’enquête met également en lumière des disparités dans les pratiques managériales. Agnès Parent-Thirion d’Eurofound observe que les salariés français sont moins impliqués dans la définition de leurs objectifs et l’amélioration de leurs conditions de travail que leurs homologues danois, un pays reconnu pour son management participatif. Des écarts significatifs apparaissent aussi entre les secteurs d’activité : dans les transports, 20 % des travailleurs reçoivent rarement ou jamais de soutien de leurs collègues, et 15 % de leur manageur. Laurent Cappelletti attribue cette situation à une « culture professionnelle viriliste » propre au secteur, où la résilience et le silence sont valorisés. Ce manque de soutien aggrave la pénibilité pour des employés souvent confrontés à des horaires décalés et à des comportements hostiles de la part des usagers. Ces métiers, paradoxalement, requièrent un soutien managérial accru mais en obtiennent moins.