
La situation sécuritaire au Sahel s’est considérablement dégradée moins de trois ans après la fin de l’opération Barkhane, décidée en novembre 2022. Cette détérioration est marquée par une multiplication des attaques djihadistes au Mali, au Niger et au Burkina Faso entre fin 2024 et le premier semestre de cette année. Des incursions meurtrières ont également touché les États limitrophes, notamment le Bénin. Les populations civiles sont régulièrement victimes de combats qui les dépassent, prises entre l’enclume et le marteau des groupes terroristes rivaux et des forces étatiques. En 2024, le Sahel a enregistré plus de la moitié des décès liés au terrorisme dans le monde, soulignant l’ampleur de la crise.
Les deux principaux groupes terroristes, le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM), affilié à Al-Qaïda, et l’État islamique au Grand Sahara (EIGS), une excroissance de Daech, prennent de plus en plus le dessus sur les armées des trois pays les plus exposés. L’année 2020 a marqué une rupture entre le GSIM et l’EIGS, entraînant une guerre ouverte après des années de coexistence pacifique. Cette violence djihadiste s’est intensifiée, notamment au Mali, où le nombre d’événements violents à moins de 150 km de Bamako a presque triplé par rapport à il y a quatre ans. Les mois de mai, juin et juillet 2025 ont été particulièrement meurtriers, avec des attaques répétées. En juin 2024, des militants d’Ansaroul Islam, probablement affiliés au JNIM, ont tué plus de 100 soldats lors d’une attaque contre une base militaire à Mansila, au Burkina Faso.
Les coups d’État militaires au Mali, au Burkina Faso et au Niger, ainsi que le retrait des forces étrangères, ont créé un vide sécuritaire exploité par ces groupes. L’EIGS a notamment doublé le territoire qu’il contrôle entre 2022 et le premier semestre 2023 au Mali, s’emparant de zones précédemment sous le contrôle du GSIM et des milices alliées à la junte. Les groupes djihadistes étendent leur influence, avec le JNIM augmentant significativement ses opérations vers le sud le long des frontières du Bénin et du Nigeria. Le silence autour du Sahel ne signifie pas la stabilité, mais plutôt une accélération de l’expansion djihadiste et une aggravation des crises humanitaires, avec plus de 3,1 millions de personnes déplacées au Burkina Faso, au Niger, au Mali et au Tchad en mars 2025. La situation exige une réponse multifacette, allant au-delà de la simple lutte contre le terrorisme, pour aborder les problèmes de gouvernance, de développement et de justice.