
Le « prêt à usage », également appelé commodat, est un contrat défini par l’article 1875 du Code civil. Il permet à une personne (le prêteur) de livrer une chose à une autre (l’emprunteur) pour qu’elle s’en serve, à charge pour cette dernière de la restituer après usage. En principe, le prêteur ne peut récupérer la chose avant le terme convenu ou la fin de l’usage pour lequel elle a été prêtée. Mais que se passe-t-il lorsque les parties n’ont fixé aucun terme ? C’est la question centrale d’une affaire récente illustrant la complexité de ce type de prêt.
En 1996, M. X a mis un appartement à la disposition de Mme Y, une amie italienne atteinte du sida, afin qu’elle puisse se faire soigner en France. Vingt-trois ans plus tard, M. X, confronté à ses propres problèmes de santé et financiers, a souhaité récupérer son bien. Cependant, son amie a refusé de quitter les lieux, estimant que le prêt était viager, lié à la durée de sa maladie incurable.
Le tribunal d’instance d’Antibes a initialement donné raison à Mme Y en 2019, qualifiant le contrat verbal de « prêt conclu à titre viager ». Toutefois, M. X a fait appel en se basant sur l’article 1889 du Code civil, qui permet au prêteur de demander la restitution de son bien en cas de « besoin pressant et imprévu ».
La jurisprudence concernant les prêts à usage à durée indéterminée a connu des évolutions. Initialement, les juges devaient fixer un terme raisonnable. Cependant, la Cour de cassation a clarifié sa position : en l’absence de terme convenu ou d’usage déterminé, le prêteur peut exiger la restitution de la chose à tout moment, à condition de respecter un délai de préavis raisonnable. Cette décision vise à concilier le droit de propriété du prêteur avec la nature gratuite du commodat, tout en évitant que l’emprunteur ne jouisse du bien à perpétuité.
Il est important de noter que l’absence de contrat écrit pour un prêt à usage, surtout pour un logement, peut entraîner des litiges complexes. Les experts recommandent de toujours formaliser ces accords par écrit, même de manière sommaire, afin de définir clairement les conditions et la durée du prêt.