
Les camélidés, incluant les lamas, chameaux et alpagas, sont les seuls mammifères connus à produire naturellement des mini-anticorps. Ces fragments, appelés « nanocorps », sont dix fois plus petits que les anticorps classiques des autres mammifères, y compris ceux des humains. Leur taille réduite leur confère une capacité unique et précieuse : celle de traverser la barrière hémato-encéphalique, une protection naturelle du cerveau, difficilement franchissable par d’autres molécules thérapeutiques. Cette découverte fortuite, faite au début des années 1990 par une équipe belge, ouvre des perspectives prometteuses pour le traitement de nombreuses pathologies cérébrales jusqu’alors incurables.
L’intérêt de la recherche médicale pour les lamas est croissant. Grâce à ces nanocorps, les scientifiques espèrent développer de nouvelles approches thérapeutiques. Des études récentes suggèrent que ces mini-anticorps pourraient jouer un rôle crucial dans la lutte contre des maladies comme la maladie d’Alzheimer, la schizophrénie, certains cancers, et même des infections virales comme le Covid-19.
Les nanocorps de camélidés se distinguent par leurs propriétés exceptionnelles : leur faible poids moléculaire, leur grande affinité pour des cibles spécifiques, et leur faible immunogénicité. Ces caractéristiques en font des outils de recherche précieux, mais aussi des agents diagnostiques et thérapeutiques potentiels. Des recherches récentes ont montré que ces nanocorps peuvent être modifiés et conçus pour cibler des récepteurs spécifiques dans le cerveau.
Par exemple, une étude française, publiée en juillet 2025 dans la revue *Nature*, a mis en évidence l’efficacité de nanocorps dérivés de lamas pour traiter certains symptômes de la schizophrénie chez des modèles animaux. Administrés par voie périphérique, ces mini-anticorps ont réussi à atteindre le cerveau et à y agir pendant plus d’une semaine, améliorant les fonctions cognitives. Cette avancée est majeure, car les traitements actuels de la schizophrénie ont des effets limités sur les troubles cognitifs.
Au-delà de la schizophrénie, les nanocorps sont étudiés pour leur potentiel dans le traitement de la maladie de Parkinson et des tumeurs cérébrales. Ils peuvent être liés à des toxines, conjugués à des radionucléides, des photosensibilisateurs ou des nanoparticules, offrant une polyvalence remarquable pour diverses applications diagnostiques et thérapeutiques. La capacité des nanocorps à traverser la barrière hémato-encéphalique, que ce soit par diffusion passive, par transporteur ou par transcytose, représente un défi, mais de nombreuses stratégies sont explorées pour optimiser leur livraison au cerveau.