
Nous, restaurateurs, avons choisi ce métier par amour de la gastronomie et des produits, avec la volonté profonde de « restaurer » nos clients. Nous prenons la parole aujourd’hui, estomaqués par l’aveuglement de nos politiques et leurs liens évidents avec l’agro-industrie. En tant qu’artisans, nous tenons à valoriser un travail manuel, profondément ancré dans notre territoire et notre environnement, un environnement que nous voyons se dégrader.
Nous sommes particulièrement inquiets pour l’avenir de notre alimentation, qui subit de plein fouet la crise climatique et une perte alarmante de la biodiversité. La hausse effrayante des cancers et la détérioration continue de la qualité des produits que nous servons, contenant toujours plus de résidus de pesticides, nous préoccupent grandement. Même l’eau, qu’elle soit minérale ou du robinet, est affectée. Notre vocation est de nourrir, non d’empoisonner.
En tant que partenaires directs, nous sommes pleinement conscients des difficultés quotidiennes des producteurs français. Beaucoup sont pris au piège d’un système à bout de souffle, qui exige une production toujours plus importante à bas prix. Ils sont déchirés entre les impératifs de rentabilité et les demandes croissantes des citoyens pour une sortie du productivisme.
Cependant, la loi Duplomb, adoptée le 8 juillet par le Parlement, n’apporte aucune solution à ces problèmes. Au contraire, elle ferme les yeux sur les véritables difficultés : la rémunération des producteurs, le libre-échange et la concurrence des denrées alimentaires. Elle les enferme dans un système intrinsèquement délétère en continuant de promouvoir des modes de production inadaptés aux enjeux vitaux de notre époque.
Aujourd’hui, près de 70 % des terres en Europe sont dégradées. Notre système alimentaire coûte à la France 19 milliards d’euros par an en externalités négatives. La loi Duplomb est une insulte aux scientifiques, aux agriculteurs qui travaillent sans pesticides, à la santé publique, et enfin, à notre propre métier de restaurateur.