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Une étude de la Dares révèle que les inégalités ethno-raciales sont largement ignorées dans les négociations collectives en France, malgré leur persistance manifeste au travail.

Une récente enquête menée par Manon Torres, post-doctorante en sociologie du travail à la Dares (ministère du Travail), met en lumière la faible prise en compte des inégalités ethno-raciales dans les négociations collectives en France. Publiée en juillet, cette étude qualitative, basée sur des entretiens avec des syndicalistes et des cadres RH, ainsi que sur l’analyse d’accords d’entreprise, révèle une marginalisation persistante de ces questions pourtant cruciales pour l’égalité au travail.

Historiquement prégnante, la question ethno-raciale s’est progressivement diluée au sein d’une lutte plus large contre toutes les formes de discriminations (genre, orientation sexuelle, religion, handicap, âge, apparence). En France, le cadre juridique actuel ne permet pas de cibler directement les groupes ethno-raciaux, s’appuyant uniquement sur un droit antidiscriminatoire jugé « faible et peu contraignant », les auteurs de discriminations étant rarement poursuivis.

Les professionnels eux-mêmes reconnaissent ce manque d’action. Lors d’une table ronde en 2024, les membres de l’Association française des managers de la diversité (AFMD) ont admis que la lutte contre le racisme en milieu professionnel avait été négligée. Maya Hagege, déléguée générale de l’AFMD, souligne que le racisme n’est pas un sujet de discussion courant dans les comités sociaux et économiques (CSE), contrairement au handicap ou à l’égalité homme-femme, car il est perçu comme « bien plus polarisant ».

Cette marginalisation se reflète concrètement dans les accords d’entreprise. L’étude de Manon Torres indique que sur 20 031 accords « non-discrimination – diversité » signés entre 2014 et 2021, seuls 227 mentionnent potentiellement le critère ethno-racial. Pourtant, les chiffres démontrent la persistance du problème : selon une enquête de l’Ined et de l’Insee de 2019-2020, 20 % des descendants d’immigrés et 22 % des immigrés ont déclaré avoir été victimes de traitements inégalitaires au travail en raison de leur origine.