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Le sociologue Juan Sebastian Carbonell analyse dans son essai l'impact de l'IA sur le quotidien des travailleurs, dénonçant un "taylorisme augmenté" qui dégrade et standardise les métiers.

L’impact de l’intelligence artificielle (IA) sur les milieux professionnels suscite de vifs débats, notamment sur les conséquences des avancées technologiques sur l’emploi. Cependant, le sociologue du travail Juan Sebastian Carbonell, dans son nouvel essai Un taylorisme augmenté (éd. Amsterdam), explore une autre facette : l’influence de l’IA sur le quotidien des travailleurs. Son étude se concentre sur l’évolution de l’organisation du travail, les conditions d’exercice, l’autonomie et la nature des tâches effectuées, ainsi que les savoirs mobilisés.

Le constat de Carbonell est sans appel : l’IA est perçue comme un « outil de dégradation du travail entre les mains des entreprises », s’apparentant à un « taylorisme augmenté ». Il soutient que l’intelligence artificielle tend à « simplifier, standardiser ou parcelliser » les métiers, quel que soit le niveau de qualification requis. Cette tendance affecte aussi bien les préparateurs de commandes que les oncologues, démontrant l’ampleur du phénomène.

L’auteur souligne également le retour de principes fondamentaux du taylorisme, tels que « l’étude du temps pris par chaque opération ou le chronométrage », particulièrement visibles chez les travailleurs des plateformes numériques, accompagnés de divers processus de surveillance. L’aspect le plus préoccupant est la « dépossession machinique » que M. Carbonell observe. En analysant l’impact de l’IA générative sur les professions qualifiées, il montre qu’elle prive les travailleurs des « gestes créatifs de leur métier », les réduisant au rôle d’« appendices ». Selon lui, l’IA ne sert pas les travailleurs et ne les libère pas des tâches monotones ; ce sont plutôt les travailleurs qui sont mis à son service.