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Le Sénat a proposé une carte Vitale biométrique pour lutter contre la fraude sociale, estimée à des milliards d'euros, mais cette proposition a été rejetée. Des arguments jugés peu crédibles et un manque d'action face à un problème persistant. Le déploiement de la CNIe biométrique soulève des questions sur la cohérence des décisions.

La proposition du Sénat d’instaurer une carte Vitale biométrique pour lutter contre la fraude sociale a été rejetée le 3 décembre dernier par la majorité parlementaire En Marche. Cette décision est jugée « incompréhensible et contre-productive » par l’iFRAP, qui déplore la gestion de ce dossier et lui attribue une note de 4/10.

Le débat autour de la fraude sociale et des cartes Vitales surnuméraires, dont le nombre est incertain (entre 153 000 et 2,6 millions selon les estimations), n’est pas nouveau. Ces « cartes Vitales cadeau » pourraient représenter une fraude annuelle de plus de 5 milliards d’euros pour l’Assurance maladie. Des sénateurs avaient proposé une loi pour la mise en place d’une carte Vitale biométrique, un système déjà existant en Europe, comme en Belgique, où la carte d’identité électronique (eID) intègre les fonctions de la carte SIS (équivalent de la carte Vitale française) depuis 2014. Ce dispositif permet une vérification de l’identité via empreinte digitale et un contrôle en temps réel du statut de l’assuré.

Le rejet de la proposition sénatoriale repose sur trois arguments jugés peu crédibles. Premièrement, une expérimentation d’e-carte Vitale serait déjà en cours dans le Rhône et les Alpes-Maritimes, mais elle n’est pas biométrique et attend le feu vert de la CNIL, un processus qui s’annonce long. De plus, cette expérimentation est prolongée de deux ans, repoussant son application au-delà de 2022. Deuxièmement, le coût d’une nouvelle carte, estimé entre 6 euros (initialement) et 15 euros (selon un rapport parlementaire de 2019), soit un total d’environ 120 millions à 900 millions d’euros, est jugé excessif. Cependant, face à plusieurs milliards d’euros de fraudes potentielles, cet argument perd de sa pertinence.

Enfin, la question de la protection de la vie privée et des données personnelles est soulevée. Un argument difficile à comprendre, d’autant plus que la nouvelle carte nationale d’identité biométrique (CNIe) est déployée depuis le 2 août 2021, en vertu du règlement européen du 20 juin 2019, qui renforce la sécurité des cartes d’identité. Le règlement eIDAS du 23 juillet 2014 établit un cadre juridique pour l’identification électronique et les services de confiance au sein de l’UE. L’insertion du numéro de sécurité sociale dans les titres d’identité est une alternative moins intrusive que la biométrie et techniquement moins risquée, selon la CNIL. La fraude sociale est estimée à au moins 13 milliards d’euros par an en France.