
Deux semaines après les annonces de François Bayrou concernant la stabilisation de la dette publique d’ici 2029, le gouvernement mesure l’ampleur de l’hostilité syndicale. Le 21 juillet, la CGT, FO et la CFE-CGC ont boycotté la concertation organisée par Astrid Panosyan-Bouvet, ministre du Travail et de l’Emploi. La CFDT et la CFTC, bien que présentes, ont exprimé leur indignation face aux grandes lignes de la réforme de l’assurance-chômage défendue par l’exécutif.
Ce troisième durcissement en cinq ans des conditions d’accès et de la durée d’indemnisation, ainsi que le resserrement des ruptures conventionnelles, vise à générer 3 à 4 milliards d’euros d’économies. Cependant, aucune étude d’impact sérieuse n’a été réalisée pour évaluer l’effet des réformes précédentes sur le retour à l’emploi, alors même que le gouvernement évoque 450 000 postes non pourvus. Dans une conjoncture morose, ce plan risque d’accroître la précarité et la pauvreté.
Acculé, l’exécutif semble préférer s’appuyer sur les sondages plutôt que sur les syndicats pour ajuster son plan avant la rentrée. Il sait la difficulté pour les syndicats de mobiliser en faveur des chômeurs et observe la popularité de la thématique de l’abus, véhiculée par l’extrême droite et la droite. Un sondage Elabe pour BFM-TV a d’ailleurs révélé que 82 % des Français soutiennent le renforcement des contrôles sur les arrêts maladie de longue durée. En revanche, la suppression de deux jours fériés est impopulaire.
Faire sans les syndicats ne serait pas une première sous les quinquennats d’Emmanuel Macron, mais l’augmentation des tensions expose le gouvernement au risque d’une censure de la gauche à l’automne. La dynamique de dialogue, initiée par François Bayrou avec le « conclave » sur les retraites, est aujourd’hui rompue. L’ampleur des ajustements nécessaires pour ramener le déficit public à 2,8 % du PIB en 2029 exige des réformes à long terme. Celles prônées par le gouvernement, axées sur le « travailler plus pour produire davantage », n’ont de chance d’aboutir que si un consensus minimal est trouvé avec les partenaires sociaux, si le sentiment d’injustice est évité, et si l’attractivité du travail et sa rémunération sont traitées en parallèle.
Comparées à leurs voisines européennes, les entreprises françaises intègrent moins vite les jeunes et se séparent plus rapidement des seniors. Agir sur ces deux leviers pour augmenter le volume de travail est la piste la plus crédible, mais cela suppose l’engagement de tous, y compris le patronat, qui a trop souvent tendance à se défausser en invoquant la concurrence internationale ou le coût du travail. Le gouvernement doit lui rappeler son rôle de partenaire incontournable du contrat social pour réussir ces réformes.