
Dans le contexte actuel, marqué par des confrontations politiques et sociales, le recours au compromis est souvent présenté comme la voie de la raison. L’idée est de trouver un consensus pour transcender les divisions au nom d’un bien commun. Cependant, la difficulté réside justement dans le fait que la définition de ce bien commun n’est pas partagée, en raison de la rivalité des forces en présence. La recherche du compromis est alors érigée en un objectif ultime, censé dépasser toutes les oppositions et dissensions.
L’exemple allemand est fréquemment cité en France pour illustrer la possibilité d’un arrangement social et politique durable, qui nécessiterait une « culture » adaptée, supposément absente chez les Français, dont l’esprit « gaulois » serait propice aux querelles. Ces généralisations sommaires occultent les conditions matérielles qui favorisent ou non cette fameuse culture du compromis, notamment les institutions et le rapport de force entre les différents camps.
Les institutions jouent un rôle crucial en rendant les compromis plus ou moins nécessaires. Un système de gouvernance centralisé, qui concentre tous les pouvoirs entre les mains d’un parti majoritaire ou d’une seule partie prenante, comme c’est le cas en France, ne favorise pas une culture du compromis. À l’inverse, un système qui décentralise le pouvoir et multiplie les lieux de décision facilite l’acceptation d’accords locaux et pragmatiques, sans remettre en cause l’identité globale des parties prenantes. De plus, certaines institutions peuvent contraindre les opposants à partager les décisions, comme la parité entre actionnaires et salariés dans les conseils de surveillance en Allemagne, ce qui rend les accords inévitables.







