Yuji-Iwasawa-CIJ
La Cour internationale de justice a rendu un avis historique, déclarant l'inaction climatique des États « illicite ». Cette décision pourrait mener à des réparations pour les pays affectés et renforce la base juridique de la justice climatique mondiale.

La Cour internationale de justice (CIJ) a rendu un avis consultatif inédit le 23 juillet, déclarant que les États violant leurs obligations climatiques commettent un acte « illicite » et pourraient être tenus de réparer les préjudices subis par les pays les plus affectés. Cette décision, adoptée à l’unanimité par la plus haute juridiction de l’ONU, marque un tournant pour la justice climatique mondiale.

Initialement demandée par des étudiants de l’archipel de Vanuatu, cette interprétation juridique du droit international offre une base solide aux législateurs, avocats et juges du monde entier pour renforcer les lois et intenter des actions en justice contre les États pour leur inaction. Ralph Regenvanu, ministre du climat de Vanuatu, a salué cet avis comme un « jalon historique », espérant qu’il inspirera de nouvelles actions judiciaires. Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a également souligné que cette décision signifiait « clairement que tous les États sont tenus, en vertu du droit international, de protéger le système climatique mondial ».

Le juge Yuji Iwasawa, président de la Cour, a affirmé que la dégradation du climat, causée par les émissions de gaz à effet de serre, constitue une « menace urgente et existentielle ». La Cour a rejeté l’argument des grands pays pollueurs selon lequel les traités climatiques existants étaient suffisants, insistant sur les « obligations strictes de protéger le système climatique » des États, pour les générations présentes et futures.

La partie la plus significative de l’avis concerne les compensations : la « violation » des obligations climatiques par un État engage sa responsabilité et peut inclure la « réparation intégrale du préjudice subi » sous forme de restitution, de compensation et de satisfaction. Bien que la Cour exige un lien de causalité direct et certain entre l’acte illicite et le préjudice, elle estime que ce n’est « pas impossible » à établir. Cet avis est le cinquième avis unanime de la Cour en quatre-vingts ans, témoignant de son poids juridique.

Cette décision a été accueillie avec enthousiasme par de nombreuses voix, des experts aux militants. Agnès Pannier-Runacher, ministre française de la transition écologique, l’a qualifiée de « victoire pour le climat ». David Boyd, ancien rapporteur spécial de l’ONU pour les droits humains et l’environnement, y voit une « victoire historique pour la justice climatique » qui « sera un catalyseur pour accélérer l’action ». Joana Setzer, juriste à la London School of Economics, a souligné que la Cour a établi pour la première fois que les États ont une obligation légale de prévenir et de réparer pleinement tout préjudice climatique. Johan Rockström, directeur du Potsdam Institute for Climate Impact Research, a qualifié la décision de « majeure », affirmant que chaque pays peut être « tenu pour responsable ».

Cet avis intervient alors que le monde n’a pas atteint l’objectif de 2°C de réchauffement fixé par l’accord de Paris de 2015, et que les COP n’ont pas déclenché une action suffisante. Andrew Raine, du PNUE, a expliqué que de tels avis clarifient l’application du droit international à la crise climatique, influençant les tribunaux nationaux, les processus législatifs et les débats publics, marquant ainsi une étape cruciale dans la lutte contre le changement climatique.