
Dans le monde professionnel actuel, la question « Ça va ? » et sa réponse convenue « Ça va » sont devenues un rituel quotidien. Ce simulacre de bien-être est souvent entretenu par des rôles bien définis, où chacun se doit d’afficher un enthousiasme et une fiabilité inébranlables. L’image de l’employé équilibré, jamais débordé par ses émotions, est valorisée, suggérant un état d’ataraxie – cette absence de troubles chère à l’Antiquité grecque, où la quiétude et la sérénité priment sur les émotions.
L’ataraxie partage des points communs avec l’équanimité et l’euthymie, notamment la capacité à ne pas se laisser submerger par les sentiments. Métaphoriquement, il s’agit de « garder la tête hors de l’eau » face au flot émotionnel. Il est intéressant de noter que l’antihistaminique Atarax, prescrit pour l’anxiété légère, tire son nom de ce concept, soulignant l’aspiration à une certaine paix intérieure dans nos vies trépidantes.
Cependant, cette injonction au bonheur masque parfois un contrat social défaillant en entreprise. Le documentaire « The Happy Worker or How Work Was Sabotaged » met en lumière les rouages d’une mécanique organisationnelle où le non-sens peut émerger des injonctions contradictoires. Même en l’absence de culture toxique avérée, le mal-être peut guetter les employés qui se sentent incapables de coller à cette image de bonheur imposée. La perception sociale biaisée, où le sourire généralisé peut entraîner un sentiment d’incapacité chez ceux qui peinent, est un enjeu majeur du bien-être en milieu professionnel.