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Les locations de courte durée en copropriété génèrent de plus en plus de conflits. La justice intervient, se basant sur le caractère commercial des prestations para-hôtelières et le trouble anormal de voisinage. Un jugement récent à Meaux a contraint une propriétaire à cesser son activité, soulignant l'importance du règlement de copropriété et de la nouvelle loi Le Meur.

La location de courte durée en copropriété est une source grandissante de conflits. Les résidents permanents se plaignent des nuisances causées par les allées et venues incessantes des voyageurs : bruits de valises, erreurs de codes d’accès et dérangements nocturnes sont monnaie courante. Ces situations soulèvent la question des recours possibles contre les copropriétaires qui exploitent des meublés touristiques, parfois au-delà des 120 jours annuels autorisés sans déclaration municipale, surtout lorsque le règlement de copropriété ne l’interdit pas explicitement.

Une affaire récente devant le tribunal judiciaire de Meaux illustre bien ces tensions. Des copropriétaires d’un immeuble à Montévrain, près de Disneyland Paris, ont demandé à leur syndic d’agir contre trois propriétaires de meublés touristiques. Bien que le règlement de copropriété autorise en principe cette activité, le syndic, conseillé par l’avocat Me Stanislas De Jorna, a décidé d’attaquer sur deux fronts : l’interdiction de toute activité « commerciale » et le principe de « trouble anormal de voisinage ».

Le premier argument concerne spécifiquement les prestations para-hôtelières. La Cour de cassation et le Code général des impôts qualifient de « commerciale » une activité qui propose au moins trois des quatre services suivants durant le séjour : accueil, petit-déjeuner, ménage régulier et changement du linge de maison. Des preuves, comme des captures d’écran d’annonces sur des plateformes telles qu’Airbnb ou Booking et des attestations de services de conciergerie, sont utilisées pour établir ce caractère commercial. Dans le cas de Montévrain, le tribunal judiciaire de Meaux a interdit à une copropriétaire de poursuivre son activité para-hôtelière, sous astreinte de 100 euros par jour, suite à la preuve de ces services. Elle a depuis cessé cette activité.

Le second fondement juridique, le trouble anormal de voisinage, est également un levier important. Même en l’absence d’interdiction formelle dans le règlement de copropriété, les nuisances excessives – bruits, dégradations des parties communes, va-et-vient incessants – peuvent justifier une intervention judiciaire. La jurisprudence condamne ces troubles, et les hôtes sont encouragés à établir des directives claires concernant le bruit et à réagir efficacement aux préoccupations du voisinage. Le syndicat des copropriétaires peut engager la responsabilité du bailleur si les nuisances excèdent les inconvénients normaux de voisinage.

Il est crucial pour les copropriétaires souhaitant faire de la location courte durée de vérifier attentivement le règlement de copropriété, notamment les clauses d’habitation bourgeoise. Une clause d’habitation bourgeoise exclusive interdit toute activité autre que l’habitation, y compris la location courte durée. Une clause simple peut tolérer des professions libérales, mais les activités commerciales et artisanales restent généralement proscrites. La loi du 19 novembre 2024 (dite loi Le Meur) renforce d’ailleurs l’obligation d’information du syndic par les copropriétaires qui louent leur bien en meublé de tourisme et permet aux copropriétés d’interdire la location de meublés de tourisme par un vote à la majorité des deux-tiers, sous certaines conditions.