
La question de la prescription en matière de responsabilité professionnelle refait surface avec un cas complexe, soulevant l’épineuse question de l’accès à la justice pour les travailleurs indépendants. Alors que la Cour de cassation a statué en faveur des salariés en matière de non-affiliation à la retraite, le sort des professions libérales face à une situation similaire reste incertain.
Depuis le 3 avril 2019, la Cour de cassation estime que la prescription de vingt ans prévue à l’article 2232 du code civil ne peut être opposée à un salarié découvrant tardivement une absence d’affiliation à une caisse de retraite par son employeur, considérant qu’une telle application violerait son droit d’accès à la justice. Mais qu’en est-il pour un travailleur indépendant qui fait face à la même problématique, non pas avec un employeur, mais avec son expert-comptable ?
L’affaire concerne M. X, un graphiste qui, en février 2017, a découvert que la société Fidexpertise, avec laquelle il avait contracté en 1990, ne l’avait pas affilié à la caisse de retraite des professions libérales. Malgré des démarches pour une affiliation rétroactive de 2012 à 2017, lui coûtant plus de 50 000 euros, il apprendra que sa pension mensuelle sera considérablement réduite, passant de 1 536 à seulement 286,50 euros.
En août 2018, M. X a assigné Fidexpertise pour obtenir réparation. Le tribunal judiciaire de Tours lui a accordé 173 687 euros. Cependant, la cour d’appel d’Orléans, en décembre 2023, a invoqué la prescription de vingt ans introduite par le législateur en 2008. Ce délai butoir, calculé à partir de la naissance du droit (en l’occurrence, 1990, date du contrat), a expiré en 2010. Son application stricte priverait M. X de son droit d’agir en justice, soulevant une potentielle contradiction avec l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme sur l’accès à un tribunal.






