
Dans le paysage politique français en constante évolution, le rapprochement entre Les Républicains (LR) et le Rassemblement national (RN) semble inéluctable. Les dirigeants du parti jadis gaulliste, en cherchant à freiner leur déclin par un alignement sur les thématiques d’extrême droite, risquent désormais l’absorption par le RN, transformé en parti de masse. Cette stratégie pourrait servir de tremplin à Marine Le Pen et Jordan Bardella dans leurs ambitions pour Matignon et l’Élysée.
Depuis un mois, des figures de LR ont activement œuvré à la rupture du cordon sanitaire qui séparait les héritiers du général de Gaulle des descendants de Jean-Marie Le Pen. Après la démission de Sébastien Lecornu, le président de LR, Bruno Retailleau, a explicitement appelé à ne donner « aucune voix à la gauche » lors d’une législative en Tarn-et-Garonne. Cet appel implicite à soutenir le candidat de l’Union des droites pour la République, appuyé par l’extrême droite, marque une évolution significative par rapport à la stratégie du « ni PS-ni FN ».
Cette brèche s’élargit constamment. Au Parlement européen, François-Xavier Bellamy, vice-président de LR, a voté pour une motion de censure rédigée par le groupe Patriotes pour l’Europe, dont le RN est membre. Laurent Wauquiez, président des députés LR, a quant à lui ciblé la « folie de l’extrême gauche » comme le principal danger pour la République, ignorant l’extrême droite. Cette convergence politique s’accompagne d’une confusion idéologique notable.
Depuis les élections législatives de 2024, les distinctions entre les deux partis sur des sujets comme l’immigration, souvent amplifiée par la sphère médiatique de Bolloré, ou l’écologie, avec des critiques récurrentes contre les énergies renouvelables, sont devenues floues. En tant qu’ancien ministre de l’intérieur, M. Retailleau avait déjà estimé que l’État de droit n’était ni « intangible, ni sacré ». Cette tentative de légitimer certaines idées de l’« union des droites » participe à l’opération de dédiabolisation de l’extrême droite.
Cette stratégie, jugée dangereuse et inefficace, voit les sympathisants de droite se tourner vers « l’original plutôt que la copie ». Les sondages révèlent une acceptation croissante du RN comme parti capable de gouverner, particulièrement chez les retraités. À moins de deux ans de l’élection présidentielle, cette évolution risque d’élargir la « fenêtre d’Overton », rendant le vote RN acceptable pour des électeurs historiquement réticents.