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À Suèvres, une marche blanche a réuni anonymes et figures de l'affaire Inass, enfant retrouvée morte en 1987. Trente ans après, l'appel à la justice face à l'inertie judiciaire résonne.

Des dizaines de personnes se sont rassemblées ce samedi à Suèvres, dans le Loir-et-Cher, pour une marche blanche en hommage à la petite Inass. Son corps avait été découvert le long de l’autoroute A10 en 1987. Plus de trente ans après, l’affaire, emblématique des enfants maltraités, continue de mobiliser. Les participants dénoncent l’inertie de la justice face à ce dossier.

L’émotion est palpable parmi les habitants. Véronique, Valérie et Nadine, toutes trois originaires de la région, se souviennent de l’effroi de l’époque. Elles fustigent l’absence de procès pour les parents d’Inass, mis en examen en 2018 pour «acte de torture et barbarie ayant entraîné la mort sans intention de la donner». Pour Arnaud Gallais, président de l’association Mouv’Enfant, «le calvaire de cette enfant continue» en raison de la lenteur judiciaire. Il souligne que «tout le monde a fait un travail remarquable» pour identifier la fillette, mais que l’inaction actuelle est incompréhensible.

Le maire de la commune, Frédéric Dejente, exprime également son indignation. Il est rejoint par d’anciens élus qui ont connu l’affaire depuis ses débuts. Raphael Pilleboue, adjoint à l’époque de la découverte du corps, estime que «ne pas rendre justice revient presque à encourager la violence sur les enfants». Inass est devenue un symbole de tous les enfants martyrisés, «adoptée par le village».

Malgré l’identification des parents, Halima et Ahmed Touloub, et leur renvoi devant une cour d’assises en janvier 2024, le procès n’a toujours pas eu lieu. Le manque de magistrats au sein de la cour d’assises du Loir-et-Cher est avancé comme raison principale. La Cour de cassation a refusé de délocaliser le procès. L’avocate Me Agathe Morel et l’association Mouv’Enfants ont alerté le Garde des Sceaux, mais les réponses ministérielles se limitent à évoquer le statut de «procès sensible» accordant une aide technique et financière, sans avancer de date.

Georges Domergue, le premier juge d’instruction en charge de l’affaire en 1987, était présent à la marche blanche. Sa présence rare témoigne de l’attachement à ce dossier. Il estime qu’«il est nécessaire que ce drame trouve son épilogue naturel : un procès». La cour d’appel d’Orléans indique que le manque de moyens contraint à prioriser les affaires, reléguant le dossier Inass, sans détenus, parmi les 35 dossiers en attente. Les actions se multiplient pour que la justice ne laisse pas cette affaire emblématique sombrer dans l’oubli et offre enfin à Inass la justice qu’elle n’a jamais eue de son vivant.