Une chronique récente du Monde a mis en lumière l’impact de l’usage du smartphone en milieu professionnel, le qualifiant de symptôme d’une « économie de l’inattention ». Selon l’article, cette utilisation inconsidérée entraînerait des pertes de productivité organisationnelle équivalentes à six jours fériés par an, sans compter les répercussions sur la santé mentale des individus. Cependant, cette vision alarmiste de la non-productivité constante au travail mérite d’être nuancée.
Il est difficile d’être constamment efficace. Nous pourrions désigner ces moments de faible productivité comme des « activités de non-travail ». La procrastination en ligne en est une illustration courante, mais une étude sur le sujet en a identifié 37 autres. Cela suggère que la distinction entre travail et non-travail est plus complexe qu’il n’y paraît, rendant difficile toute quantification précise. De plus, l’utilisation du smartphone est également un vecteur de travail en dehors des heures et du lieu de travail, une dimension souvent ignorée dans ces analyses.
La question de l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée est centrale. Les pratiques telles que consulter ses courriels au réveil ou finaliser un dossier le soir à la maison sont monnaie courante, témoignant d’une colonisation du travail dans l’espace personnel. Le smartphone, loin d’être un simple outil de distraction, est un support privilégié pour cette fluidité entre sphères professionnelle et personnelle. Cette réalité, peu prise en compte, pourrait pourtant offrir des pistes pour améliorer la santé mentale des travailleurs.
Il est pertinent d’examiner le phénomène inverse : l’engagement dans des activités non professionnelles au bureau. Le téléphone mobile cristallise des pratiques jugées personnelles, alors qu’en réalité, les interactions professionnelles et intimes s’y mêlent. On communique via des applications de messagerie avec ses proches, mais aussi avec ses collègues. Les sujets personnels et professionnels s’entremêlent, que ce soit en évoquant sa vie privée au bureau ou en discutant de problèmes professionnels avec sa famille et ses amis.
