
Les héritiers qui patientent pour la liquidation d’une succession doivent être vigilants : le simple fait de payer les taxes foncières du défunt ne garantit pas la propriété future d’un bien, comme le démontre une affaire récente. En 1986, Mme X décède, laissant à ses cinq enfants une maison et trois parcelles de terrain à Mers-les-Bains. Trente ans plus tard, la succession n’est toujours pas réglée. Deux des filles de la défunte ont pourtant payé les taxes foncières pendant toutes ces années, l’une d’elles habitant même la maison en question.
En 2016, suite à une question du maire concernant ces biens dégradés par des squatteurs, le fisc et le cadastre ont statué qu’ils étaient des « biens sans maître » en vertu de l’article L. 1123-1, 1° du code général de la propriété des personnes publiques. Ce statut est appliqué lorsque « la succession est ouverte depuis plus de trente ans et pour laquelle aucun successible ne s’est présenté ». Selon l’article 780 du code civil, le successible est alors réputé avoir « renoncé » à la succession.
Les biens ainsi déclarés deviennent la propriété de la commune sans aucune procédure de publicité. Bien qu’une « enquête de voisinage » soit préconisée par le ministère de l’Intérieur depuis 2006 pour éviter les litiges, les héritiers concernés n’ont pas été contactés. Le 2 mars 2016, le conseil municipal a ainsi autorisé l’appropriation des parcelles par la commune. Les héritiers ont découvert cette décision en janvier 2018, lors de la démolition des murs de la maison. L’une des héritières a alors assigné la commune, arguant que le paiement des taxes foncières prouvait leur intention de se « présenter » à la succession, contestant ainsi la notion de « biens sans maître ».