
Dans le monde du travail actuel, les stages, expériences de volontariat, apprentissages et services civiques occupent une place de plus en plus significative sur les CV. Face à une augmentation constante du nombre de diplômés et un allongement de la période d’insertion professionnelle, les jeunes sont contraints de se démarquer pour trouver leur place. Florence Ihaddadene, sociologue à l’université de Picardie Jules-Verne et spécialiste reconnue du service civique, décortique cette problématique dans son ouvrage « Promesse d’embauche. Comment l’Etat met l’espoir des jeunes au travail » (La Dispute, 2025). Elle y fustige une accumulation de dispositifs dérogatoires au droit du travail, qu’elle perçoit comme une politique de la jeunesse ayant de lourdes conséquences sur le rapport des jeunes au monde professionnel.
Madame Ihaddadene analyse ces dispositifs – stages, emplois aidés, services civiques, apprentissages – comme les piliers d’une véritable « politique de l’espoir » orchestrée par l’État français à destination des jeunes. Cette approche, loin d’être un manque de politique globale, constitue selon elle une stratégie cohérente. Elle vise à maintenir les jeunes dans une forme d’attente et de concurrence, justifiant ainsi la prolongation de leur période de formation ou de recherche d’emploi avant une insertion réelle. L’État, en multipliant ces initiatives depuis cinquante ans, formule des promesses d’avenir qui, souvent, ne peuvent être honorées.
Cette politique génère un système où les jeunes sont mis au travail gratuitement, attendant une insertion professionnelle et citoyenne, tandis qu’une menace de marginalisation pèse sur d’autres. La sociologue souligne que si cette politique de l’espoir fonctionne, c’est parce qu’elle repose aussi sur une menace : promesse de méritocratie pour certains, mais risque de chômage et de sélection pour d’autres. Finalement, l’État produit des individus « en attente mais disponibles, dépendantes et dociles », parfaitement adaptés aux exigences du capitalisme néolibéral, selon Florence Ihaddadene.