
L’annonce récente de droits de douane de 15 % sur les importations européennes aux États-Unis, bien que moindre que la menace initiale de 30 % de Donald Trump, est accueillie avec inquiétude en Irlande. Neale Richmond, ministre d’État aux Affaires étrangères à Dublin, a exprimé la prudence de l’île d’Émeraude face à cet accord commercial. Neuvième économie européenne, l’Irlande est surnommée le « 51e État américain » en raison de sa forte dépendance économique envers les États-Unis.
L’Irlande est le pays de l’UE le plus dépendant du marché américain. En 2024, ses exportations vers les États-Unis ont atteint un montant record de 72 milliards d’euros, représentant plus de la moitié de ses ventes hors UE, un taux inégalé dans l’Union. Parallèlement, ses importations depuis les États-Unis ont légèrement diminué à 21 milliards, créant un excédent commercial historique de 50 milliards d’euros, le deuxième plus élevé de l’UE après l’Allemagne. Cette dynamique s’est intensifiée au premier trimestre 2025, avec une augmentation de 63,6 % des exportations irlandaises à 88,4 milliards, dont 68 % ont été absorbées par les États-Unis.
Le secteur pharmaceutique est le principal moteur de cette performance. En 2024, les exportations de médicaments et produits pharmaceutiques ont bondi de 29 %, atteignant près de 100 milliards d’euros, soit près de la moitié des ventes irlandaises à l’étranger. Ce succès est largement dû à la présence de « big pharma » américaines comme Pfizer et Johnson & Johnson, qui produisent massivement en Irlande avant de réexpédier leurs produits aux États-Unis. Eli Lilly fabrique notamment son traitement contre l’obésité, le Zepbound, à Cork. En mars 2025, les exportations de produits chimiques et pharmaceutiques vers les États-Unis ont explosé de 536 %, s’élevant à 23,9 milliards d’euros, en prévision des droits de douane américains.
La fiscalité avantageuse de l’Irlande est une clé de son succès. L’impôt sur les sociétés y est de 12,5 % et 15 % pour les grandes entreprises, contre 21 % aux États-Unis. De plus, l’Irlande offre un accès privilégié au marché européen, attirant ainsi les géants américains de la tech, puisque 8 des 10 plus grandes entreprises mondiales de la tech, dont Google, Facebook, Apple et Microsoft, y ont leur siège européen. Ces entreprises représentent une source de revenus fiscale considérable pour Dublin, totalisant 108 milliards d’euros en 2024, soit plus de 20 % du PIB irlandais. Cependant, cette dépendance expose l’Irlande aux politiques protectionnistes américaines, qui pourraient menacer ce modèle économique.