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Un nouveau « tatouage » temporaire, mis au point par des chercheurs coréens, détecte la présence de GHB dans les boissons. Un outil innovant qui, malgré son efficacité, ne dispense pas d'une vigilance accrue.

Des chercheurs ont mis au point un « tatouage » temporaire, qui promet de détecter la présence de GHB (y-hydroxybutyrate) dans une boisson. Cette drogue est fréquemment associée aux agressions sexuelles par soumission chimique. L’autocollant, développé par des chercheurs coréens, réagirait instantanément, même pour de faibles concentrations ou quantités, dans divers liquides, du whisky au café. Ce qui est nouveau avec ce tatouage, outre son format original et esthétique, est qu’il surmonte les limitations des dispositifs qui l’ont précédé, notamment la faible durabilité des résultats, la sensibilité limitée et le temps de réponse inadéquat des capteurs colorimétriques à base d’hydrogel et de nanofibres.

En pratique, le « tatouage » est un autocollant constitué d’un fin film plastique recouvert de gel d’agarose, contenant un récepteur chimique qui change de couleur en une seconde au contact de GHB. Il suffit d’y mettre une goutte de la boisson suspecte. Le résultat affiché, s’il est positif, reste visible durant les 30 jours qui suivent, selon les chercheurs. Cependant, cela ne peut, au mieux, qu’alerter sur un risque possible. « Cela n’a absolument aucune valeur sur le plan médico-légal », avertit Leila Chaouachi, pharmacologue et fondatrice du Centre de Référence sur les Agressions Facilitées par les Substances (CRAFS). Juridiquement, la seule chose permettant de prouver que l’on a été drogué reste le test sanguin ou d’urine.

Le tatouage détecte des concentrations de GHB de 0,01 mg/mL à 0,1 mg/mL dans diverses boissons telles que le whisky, la vodka, la bière, le soju et le café. « C’est vertueux que la recherche se tourne vers ces sujets, mais ça ne constitue pas un barrage au crime », explique la pharmacienne. Le GHB est connu du grand public comme « la drogue du violeur », mais il n’est qu’une des centaines de substances utilisées à cette fin. D’après l’enquête sur la soumission chimique menée en 2022 par le centre d’addictovigilance de Paris, les drogues sont utilisées dans 43,3 % des cas de soumission chimique, avec le MDMA en tête. Les médicaments sédatifs (antidouleurs, somnifères) sont incriminés dans 56,7 % des cas.

Les chercheurs coréens souhaitent étendre la détection à d’autres substances, mais il est illusoire de penser pouvoir mettre au point un dispositif capable de détecter tous les produits possibles. De plus, dans la majorité des cas, les agresseurs ne droguent pas volontairement la victime, mais profitent d’un état de vulnérabilité déjà instauré. Pour Leila Chaouachi, « il faut surtout faire attention aux messages que peuvent véhiculer ces détecteurs. Le risque est qu’on se croie protégé et que ça entretienne des idées reçues. » Elle évoque notamment le mythe de l’inconnu, alors que dans de nombreux cas, l’agresseur est un proche ou une personne en qui l’on a confiance. La vigilance doit être avant tout collective : « Il faut faire attention les uns aux autres, connaître les signes qui alertent, savoir comment mettre en sécurité et orienter celui ou celle qui pourrait avoir été drogué. » Des initiatives comme le label qualité de l’association Act Right engagent les établissements festifs à mettre en place des solutions de réduction des risques, telles que des safe zones et un personnel formé. En 2022, 1229 cas d’agressions facilitées par les substances ont été recensés en France, mais on estime que seulement 10 % des victimes de violences sexuelles portent plainte. Bien qu’un outil comme ce nouveau tatouage soit prometteur et accessible, il ne couvre qu’une infime partie d’un problème complexe et de grande ampleur.