
Louer 70 mètres carrés avec terrasse et place de parking dans un immeuble neuf d’un quartier verdoyant en plein cœur de Vienne, pour 1 500 euros charges comprises ? Cette annonce, publiée début juin sur un site immobilier autrichien, ferait rêver n’importe quel Parisien. Mais dans la capitale autrichienne, considérée comme un paradis pour locataires, elle est plutôt vue comme une illustration de la forte hausse du prix des logements observée ces dernières années. Cette perception souligne une tension croissante sur le marché immobilier viennois, malgré sa réputation d’accessibilité. La comparaison avec Paris met en lumière un contraste saisissant des attentes et des réalités des coûts de logement en Europe.
En Autriche, les loyers du secteur privé non régulés sont souvent indexés sur l’inflation, et celle-ci a progressé de plus de 20 % en trois ans. À tel point que le sujet a agité la campagne pour les élections municipales, en avril. Cette indexation, couplée à une inflation significative, pèse lourdement sur le pouvoir d’achat des locataires. « Le modèle viennois de logement abordable reste considéré comme un exemple au niveau international », a toutefois répété le maire (social-démocrate), Michael Ludwig, largement réélu, avec près de 40 % des voix – après avoir fait campagne en promettant de continuer la politique qui fait depuis cent ans la fierté de « Vienne la rouge » : le logement social. La politique de logement social est un pilier fondamental de l’identité viennoise et un atout majeur pour maintenir l’accessibilité.
Même si le marché purement privé s’est en effet un peu tendu depuis le début de la guerre en Ukraine, la cité danubienne, avec ses 2 millions d’habitants, reste l’une des capitales les moins chères pour se loger en Europe occidentale. Cette résilience est remarquable, surtout dans un contexte géopolitique tendu. « Notre secret ? C’est ce tout petit quartier », aime répéter Thomas Ritt, en montrant un diagramme de la répartition du marché de l’habitat dans la ville. « Le marché privé locatif à prix libre ne représente que 11 % de tous les logements », vante cet économiste spécialiste du logement à la Chambre des travailleurs, une institution proche des syndicats. Cette faible proportion de logements privés à prix libre est la clé de la stabilité relative des loyers à Vienne, un modèle qui pourrait inspirer d’autres métropoles européennes.